La Légende de la Cueva del Agua ...
(« La source des Amoureux »)

la chanson de Là bas...à la Cueva l'aoua

 merci à Jean-Baptiste ANDRES de nous avoir envoyé l'article

Un bey d’Oran gardait dans son châteauneuf, une captive de quinze ans, Pépita, enlevée par des pirates sur les côtes d’Espagne. Ce Bey avait aussi un captif jardinier, jeune et galant espagnol qui, comme beaucoup des nos vaillants et chers Oranais d’origine espagnole, se nommait Pépé.

En cachette, Pépé offrait à Pépita ses plus belles fleurs et, pour elle le soir, chantait ses plus tendres airs du doux pays de Murcie en s’accompagnant à la guitare. Fleurs et chansons font naître l’amour mais les deux jeunes gens ne pouvaient s’aimer en esclavage. Enfin ils parvinrent à s’échapper par le ravin Aïn-Rouina, sous le palais du Bey. Dans la nuit violette, cloutée d’or comme le sont les nuits oranaises, ils arrivent à la crique de Canastel et se cachèrent dans la grotte qui, à cette époque là, n’avait pas de source.

Pépé avait fait entente avec des contrebandiers qui devaient le recueillir, lui et Pépita, dans leur balancelle ne navigant que la nuit. Pour être aperçus des marins de l’embarcation, Pépita étendrait de la largeur des ses bras la mantille qui lui couvrait la tête. La crique d’alors était recouverte de genêts jaunes, et les marins de la balancelle ne pouvant distinguer la mantille noire dans la nuit, abandonnèrent les amoureux à leur sort.

Mais voilà que, pour sauver les deux amoureux, les jenêts se firent blancs ! … de loin, la mantille noire se verrait sur ce fond blanc. Plusieurs nuits passèrent sans que la balancelle reparût. Le supplice de la faim et surtout de la soif commença. Pépé avait bien emporté du palais une outre en peau de bouc pleine d’eau, mais l’eau s’épuisa bien vite et le bateau ne venait pas.

« Ah, mon pauvre Pépé, dit Pépita, nous allons mourir de soif … » deux, trois nuits passèrent encore, augmentant les souffrances. Pépita n’eut plus de force d’aller devant les genêts blancs, faire un signal avec sa manille. Pieuse espagnole, avant de mourir elle pria Notre-Dame d’Afrique : « Sainte Vierge, envoyez-nous à Pépé et à moi, un peu d’eau … » Et les deux amoureux entendirent alors, dans le fond de la grotte, comme un rire, quelqu’un était là … un arabe sans doute qui riait de leur malheur avant de les capturer … Vaillant chevalier servant, Pépé s’avança pour voir d’où venait ce rire. Aussitôt, il poussa un cri : « Pépita, la Vierge t’a entendue ! elle t’envoie de l’eau ! … De l’eau dans ces rochers, vraiment de l’eau ! … pas saumâtre comme celle de toutes les sources de la plaine, claire, douce, de l’eau qui sortait avec un rire d’enfant. Pépita remercia la Vierge et but à pleines mains à ce filet d’eau. « On dirait, s’écria-t-elle, une rivière pour les oiseaux ! » Et Pépé, en galant espagnol, répondit par une copla souvent chantée à l’aide de saguitare : « Eh bien ! N’es-tu pas un ange, avec des ailes, comme un oiseau du ciel ?

Cette nuit là, Pépita étendit sa mantille, sur les genêts blancs et les marins de la balancelle l’aperçurent. Ils prirent le soin d’emplir un tonnelet de cette eau merveilleuse pour l’offrir en Espagne à leurs bien-aimées.

Depuis, au lundi de Pâques, pour la grande fête oranaise de « a Mona », novios et novias, Pépé et jolies Pépitas, et aussi bien des français, viennent à la crique de Canastel, parmi les genêts blancs, danser sur les galets d’or et boire en tout temps l’eau de la Cueva. On y vient d’ailleurs boire en tout temps, à la source d’amour, son eau porte bonheur aux amoureux, je vous l’assure ! … D’ailleurs vous pourrez vous en rendre compte par vous-même …

Document Photo et texte transmis par J-P Bodin d’après l’article de Léon Sazie dans l’écho d’oranie (n°201, mars 89)

MERCI à Alain GOMEZ pour les photos

 RETOUR