Oran... Un cinq Juillet 1962 ...
... Dernière mise à jour le 28 novembre 2007 ...    

Ce jeudi 5 juillet ne paraissait pas devoir être, à Oran, une journée plus angoissante que les autres. Comme depuis cinq jours, les Oranais s'éveillaient dans les rumeurs d'une foule qui avait déjà envahi la rue, ivre de promesses et de rêves. On allait enfin connaître le bien être, le monde allait changer de face, le pactole allait couler. Et la fête continuait... tandis que les Français qui étaient encore là bouclaient leurs valises ou attendaient, écrasés de soleil et de misère, un bateau sur les quais ou un avion aux abords de l'aérogare.

Un soulagement pourtant se faisait jour parmi ces Français-là. Tous avaient redouté la date fatidique du 1er Juillet (référendum) et plus encore celle du 3 Juillet qui avait vu défiler sept katibas de l'A.L.N. dans Oran. Or, rien de ce qu'on avait craint ne s'était passé. Les enlèvements se succédaient, certes, les attentats sournois au coin des rues, aussi, mais il n'y avait pas eu de déferlement de la masse musulmane et le chef de détachement des unités de l'A.L.N., le capitaine Bakhti avait déclaré aux Européens: «Vous pourrez vivre avec nous autant que vous voudrez et avec toutes les garanties accordées par le G.P.R.A. L'A.L.N. est présente à Oran. Pas question d'égorgements ! Bien au contraire, nous vous garantissons une vie meilleure que, celle que vous connaissiez auparavant !» De plus, le général Katz, en personne, avait estimé qu'il avait pris toutes les dispositions nécessaires pour que les manifestations du 5 Juillet à Oran se passent dans le calme le plus absolu. Avec le capitaine Bakhti, il s'était engagé à ce que les réjouissances algériennes ne débordent pas en ville européenne. Pourquoi dans ce cas là s'inquiéter plus que de coutume ? La fête marquant la célébration de l'indépendance algérienne pouvait commencer...

Cependant, dès l'aube, le village nègre se mit en, mouvement et contrairement à ce qui avait été promis, ce furent des milliers de Musulmans qui déferlèrent vers la ville européenne, s'étourdissant dans les cris, les chants, les you-you des femmes. Rien ne laissait encore prévoir le drame qui allait se passer. Pourtant de nombreux Européens constatèrent que certains avaient une arme à la main et que beaucoup d'autres tentaient de dissimuler soit un revolver, un couteau, un fusil, une hache ou un gourdin. Le doute n'était plus permis. Alors les plus avertis se barricadèrent et on essaya de prévenir par téléphone les amis et la famille de ses craintes.

Place Jeanne d'Arc située devant la cathédrale, une musulmane, après avoir poussé une sérié de you-you stridents, grimpa sur le socle de la statue équestre de la pucelle d'Orléans. On lui tendit un drapeau vert et blanc qu'elle accrocha à l'épée que Jeanne d'Arc pointait vers le ciel. Une immense clameur accueillit cette action. Survoltée par sa prouesse, la mégère entreprit, toujours juchée sur le socle, une danse du ventre endiablée, supportée en cela par de milliers de mains qui claquaient au rythme de la danse. Ainsi, tout le monde exorcisa le mythe insupportable de la virginité de l'héroïne et participa au viol collectif de la statue. Il n'y avait plus de France en Algérie, il n'y avait plus de pucelle française ; l'Algérie appartenait aux algériens !

Dans les garnisons françaises, certains émettent quelques inquiétudes : «Il était entendu que la manifestation ne déborderait pas dans les quartiers européens et ils sont maintenant des dizaines de milliers au centre ville. Ils ont rompu leur engagement, ça va aller mal, ça se sent...» Et un officier, irrité par cet < excès de pessimisme> de répondre: «Enfin, ils sont chez eux oui ou non ?»

Vers dix heures trente, on apprenait que le quartier juif était le théâtre de scènes de pillage. Les maisons étaient envahies, les meubles jetés par les fenêtres. Déjà on déplorait les premières victimes européennes... A la même heure, le propriétaire d'un café était abattu d'une rafale de mitraillette dans son établissement tandis que boulevard Joffre, un marchand d'articles de voyages était pendu dans son magasin. Des témoins téléphonèrent aussitôt au quartier du général Katz mais, là, on pensa, à «Oranais, Oranaises, n'écoutez pas ceux qui vous mentent (sous-entendu, l'O.A.S.) L'armée est ici et restera pendant trois ans pour vous protéger.» C'était, les 26, 27 et 28 Juin !

Des hommes en tenue de combat, rutilantes de neuf, «les valeureux soldats de la libérations», et d'autres civils armés se déversaient dans les immeubles et en ressortaient des files d'Européens, hommes, femmes, enfants, vieillards. Ces malheureux < convois de la mort» prenaient la direction d'Eckmühl, du Petit Lac et de la Ville Nouvelle, mains sur la tête, sous les sarcasmes, les injures, les coups et les huées de la populace. Pour eux, c'était la fin, ils le savaient et ils priaient pour que la mort vint les prendre le plus vite possible et les arracher aux supplices qui les attendaient. Avec amertume ils se remémoraient les paroles de Fouchet : « la France n'oubliera jamais l'Algérie. Sa main sera toujours là pour l'aider... «Comment pouvez-vous croire que la France puisse vous abandonner ? Vous avez la garantie d'un traitement privilégié». Il est vrai que le Ministre n'avait pas précisé de quel traitement il s'agirait !... Et aujourd'hui, la ville toute entière leur paraissait une tombe … la leur. Aucune aide de personne à attendre. Crier, appeler au secours, tout était inutile. C'était le colonialisme et la génération nouvelle qu'on allait détruire, voilà tout. Alors, qu'importait qu'on saignât les enfants et qu'on ouvrît le ventre des mères, qu'on arrachât les tripes des suppliciés et qu'on les pendît par les pieds au-dessus de braises incandescentes...

De la colonne qui avançait péniblement, une femme âgée tenant ses deux petits enfants par la main, leur disait d'un ton rassurant :
- Ne pleurez pas, mes chéris. Nous allons dans le paradis terrestre.
- Celui où vivent Adam et Eve, demanda naïvement la petite fille ?
- Le même, mes petits, car ce beau jardin, c'est ici qu'il existe...

La clameur se répercutait sur la ville durant tout le temps que dura le sinistre chemin de croix, jusqu'au lieu même du supplice. Au Petit Lac, un spectacle insoutenable, inhumain, vint briser ce qui leur restait encore de force
Des hommes, des femmes, des enfants se jetaient les mains jointes aux pieds de leurs bourreaux, implorant leur pitié en pleurant. Mais aucune générosité n'était à attendre de la part de ces barbares. Les coutelas entrèrent alors dans une danse macabre, ouvrant les gorges, tranchant les têtes de leurs victimes, malgré les cris horribles des familles enlacées dans une dernière étreinte.

Cette boucherie n'était pas encore suffisante pour ces barbares assassins, il fallut montrer ces têtes en trophées à la populace qui hurlait sa joie en poussant des clameurs d'admiration sauvages telles que l'on entend au moment où le taureau, dans l'arène, fait glorieusement face au matador. L'instinct de férocité native s'était, chez tous, réveillé par le cruel supplice, et leurs yeux étincelaient d'ardeur de bêtes fauves assoiffées de sang. Alors, dans une bamboula furieuse, les démons exhibèrent sur des piques sanguinolentes en signe de victoire ces pauvres têtes aux traits crispés qui grimaçaient encore d'un rictus horrible de souffrance. Les yeux, restés ouverts, semblaient vouloir maudire les mains criminelles de leurs bourreaux.

Aux abattoirs, les Arabes pendaient les Européens, vivants, par le palais. D'autres étaient pendus par les pieds puis on leur ouvrait la gorge en laissant ruisseler le sang dans des cuvettes. Comment pardonner … 45 ans après … l'horreur de ce sang pleurant des viandes, ces bouts de cadavre que l'étal tenait suspendus à ses crochets ? Le crime est bien trop grand pour que nous n’en perdions jamais le souvenir.


Cela fait :
an jours heures minutes secondes

que ce crime est impuni...

Vous voulez tout savoir sur cette macabre journée ...

 

Le site Geneviève de TERNANT
le site de la vérité
sur le massacre
du 5 juillet 1962
à ORAN

Depuis le 25 novembre 2007 ... ils ont trouvé la paix

  

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