Souvenir de la Téjéra ...
Elles s’étalaient du 1er Juillet au 1er octobre .Trois grands mois
pour en profiter dans ce cadre magnifique. Les années 58/60 , resteront celles
de mes meilleures vacances d’enfant. Le bonheur était tout simple, il tenait en
un seul mot « le cabanon ».
En dehors de ses congés mon père effectuait en
moto (une Terrot 125 culbutée) l’aller-retour quotidien, jusqu’à son travail.
Il nous assurait ainsi un ravitaillement régulier. Mes frères et sœurs aînés
s’occupaient déjà de leurs petites familles respectives.(quatre mariages entre
1955 et 1958). Pendant de longues semaines, nous n’étions plus que Sept
à partager nôtre palace . Sa construction terminée, pas de place pour les
fioritures inutiles.
Le confort était sommaire mais il ne manquait rien
d’essentiel .On possédait même une glacière (semblable à celle des HLM) grande
armoire de bois tout habillée de zinc à l’intérieur et qu’on garnissait tous
les jours d’un pain de glace. Mais ce pain de glace il fallait aller le
chercher… aux genêts… tous les jours… en plein soleil…en passant par la dune
surchauffée…..Il fallait bien un bon quart d’heure pour arriver jusqu’à la camionnette où les dernières
barres protégées par des sacs de jute gouttaient sur le sable. Au retour je ne
sais pas ce qui était le plus pénible, la chaleur du sable, ou le poids de ce
cabas trimbalé entre ma sœur la géante et moi la naine…
Je vous assure qu’on faisait « fissa » pour rentrer. Heureusement par
la suite, avec la route goudronnée, la glace arriva jusque chez nous à la Téjéra dans une buvette-épicerie-dépôt-de pain-bazar.
La dune redevenue terrain de jeux à la fraîche résonnait de cris et de rires. ! On faisais, des « cabriolettes » On glissait sur les fesses ou à plat-ventre. Je remontais péniblement à quatre pattes jusqu’en haut si aucun « bicho malo » ne me tirait par un pied pour m’ en empêcher. C’ était la règle du jeu ! Le nez et la bouche pleins de sable je me cachais alors derrière un genêt pour me nettoyer en ruminant des pensées de vengeance….quand on m’avait un peu oubliée, je devenais bicho-malo à mon tour ………
Autre rituel journalier : l’eau fraîche.
Utilisée avec économie, l’eau de la citerne
couvrait les besoins normaux de la toilette du ménage, et de la lessive, mais pour
la cuisine, et la boisson, on prenait l’eau fraîche à la source de chez RETCH.
Cette eau limpide et glacée coulait
d’un tube assez haut me
semble-t-il sur une surface sommairement aménagée et se déversait
ensuite directement dans la mer. A certaines heures c’était l’affluence. Tout
un petit monde se retrouvait là avec son récipient , cruche, nourrice, gargoulette ou autre, pour recueillir cette merveille, profitant de cette pause pour
bavarder en riant.
Parfois Mme ABECCASSiS (où une autre) essayait de
resquiller son tour sous un faux
prétexte provoquant immédiatement un
jaléo qui
mettait en joie tous les « espectateurs » .Pour éviter la
cohue mieux valait choisir un moment creux,
le matin de bonne heure ou en fin de journée quand baigneurs et pécheurs
abandonnaient la plage et les rochers. L’occasion de s’offrir un
shampooing-douche (avec du savon de Marseille sans parfum ni colorant) rapide
mais des plus revigorants. Mais quelque soit l’heure on ne remontait jamais de
la mer sans ramener de l’eau de la
source..
Le chemin entre
chez nous et la mer, zigzaguait entre
les cabanons, tantôt large, tantôt resserré avec de nombreux escaliers. A midi tout le
monde ou presque rentrait de la plage avec sa provision d’eau douce, en file indienne, au aurait dit une
procession de fourmis géantes. !
Des parfums de paëlla, de poisson grillé ou de
caldéro nous chatouillaient les narines au passage devant les vérandas aux
volets largement ouverts. Des commentaires gourmands
saluaient les cuistots et nous mettaient l’eau à la bouche…..D’une treille à
l’autre on suivait le mûrissement du raisin pour le
comparer au nôtre .
Je me souviens particulièrement de celle des CALATAYUD, qui faisait l’admiration générale : une très vieille treille avec ses gros troncs tarabiscotés ,entretenue à merveille et dont le feuillage dense faisait une tonnelle si ombragée qu’il y faisait presque noir. J’ignorais alors que ce superbe cabanon appartenait à un grand ‘oncle de Christian….
Fin du 3e épisode