Paul GIMENO : Un pied-noir
de la Cité des Jardins en Mer du Nord :
... 
par Pierre GIMENO

 

A propos de mon petit frère Paul…du B5 aussi !!

Et 2 ans tout juste après sa disparition … Il était né en 1952 …(et Anne-Marie en 50)

Philosophe, il était devenu, c’est le mot qui convient

Et j’ai pu vérifier lors de ses obsèques il y a pile 2 ans, à Gand, l’estime et le respect dont il était l’objet, au moins dans les milieux universitaires de Gand et Bruxelles.

A telle enseigne que certains veulent encore aujourd’hui, quoique très difficile en édition, publier sa thèse de…850 pages (de format A4 !!)

Son livre posthume, « Pour une écologie de l’éducation » chez « Liberté j’écris ton nom » ( voir Google) fut publié avec ma contribution pour la simple raison que Paul venait de disparaître (autorisations et droits) ; et à cette occasion aussi, j’ai pu voir le «capital » d’estime et de reconnaissance acquis chez ses collègues dans son domaine de recherche ; à savoir l’éthique environnementale.(préface de l'ouvrage par Alain LIPIETZ)

A signaler d’ailleurs que cet éditeur se donnant un objectif de vulgarisation des grandes questions philosophiques et de société, Paul avait réécrit en partie son sujet, afin de rendre son propos relativement abordable pour un grand public.

Je m’en suis d’ailleurs régalé, car j’ai eu le privilège de donner le « bon à tirer » ; sans compter le fait essentiel , c’est que je partageais amplement ses idées d’éthique politique et de « partage sociétal »… Et je reste torturé par le regret de ne pouvoir reprendre tous ces thèmes avec lui…

Ses obsèques furent extrêmement émouvantes, avec « les Femmes de sa vie » que nous connaissons bien (Elsie et Gudrun), ses amis, et ses collègues ; sa famille bien sûr.

Encore plus la 2° cérémonie, plus d’une semaine après l’incinération (qu’il avait choisie) : la dispersion de ses cendres en mer, au large d’Ostende, avec un lâcher de mouette… Sublime et insupportable !!

C’était le 21/09/2003…après qu’il eut décidé de se pendre…, avec une lucidité incroyable et en ayant assuré une redoutable préparation de son « geste »… Mais en n’ayant pas le moins du monde souhaité expliquer sa décision… Ite missa est

Mais,  parlons aussi des HLM : Paul était un petit garçon très timide, et que je me souvienne, je ne suis pas sûr qu’il passait beaucoup de temps dehors à jouer … De plus, il était plutôt fragile et Maman le sur-protégeait.

Je me souviens qu’il était trop sensible au soleil, qui le faisait vite saigner du nez, ; il y eut plusieurs incidents et de grandes trouilles avec ça ; Madame Allouche notre voisine s’en souviendrait, elle qui avait aidé Maman lors de saignements qui n’en finissaient plus.

Paul craignait beaucoup Papa, ça c’est clair, son autorité franchement militaire, et la voix qu’il employait pour l’exercer. Si bien qu’une fois « l’âge mûr » atteint, en France bien sûr et à ses 17 ans, Paul est parti … Il a fait tout seul et en prémices, son « mai 68 » à lui : le rejet de « tout »… Lui le timide, est devenu le « Rimbaud » de la famille : Afghanistan, Jérusalem, les Pyrénées chez les moines bénédictins de Belloc, guide touristique en Espagne… ; et puis Gand il y a près de 30 ans maintenant

Très doué pour les langues et totalement autodidacte, il rentrait comme assistant de cours à l’Université. Il maîtrisait l’espagnol, l’anglais, et le néerlandais bien sûr, devenu la langue de son quotidien et de ses études dans ce pays pour le moins flamand.

Puis admis à faire ces recherches dans le domaine de l’éthique … plusieurs ouvrages en néerlandais, en anglais ; des articles dans la revue « critique » … jusqu’à cette thèse, admise en français (il y tenait…) dans cette contrée particulièrement flamande.

J’oserai dire une superbe réussite ( si l’on peut dire aujourd’hui !!), dont j’étais très fier. Une culture énorme, et une capacité de travail étonnante. Moi qui aimait tant sa maison, et son bureau, je le décrivais avec beaucoup de tendresse et d’admiration, comme « l’ermite » de la famille.  A la fois « Le Moine copiste », en version PC ; et l’érudit…

Par contre, et sans avoir jamais pu savoir pourquoi, il avait toujours gardé une distance certaine avec « tous » ; et même tous ceux de sa famille…y compris nous deux, frère et soeur.

Un grand mystère encore pour moi et Anne-Marie…

De bonnes relations oui, mais trop rares ; de son propre choix. Trop grave, comme Papa ; il se surprenait lui-même quand il partait à rire devant mes… « conneries » ou pitreries habituelles.

Et sur les 3 dernières années, un comportement curieusement ambigu, cynique, voire agressif, notamment à distance avec Anne-Marie (elle est à Nice). Nos rencontres devenaient plus rares.

Son entourage à Gand nous a parlé de courtes dépressions répétitives, voire chroniques ; malgré des activités assez « normales » ; y compris dans le sport puisqu’il pratiquait le vélo assidûment … Martine, mon épouse (…préférée) dit encore : « très attachant, mais aussi intimidant et très impressionnant ». C’était le raffinement même, le bon goût ; mais quelque chose de hautain qui effectivement pouvait mettre les autres quelque peu mal à l’aise.

Chez lui, et malgré de vrais talents d’accueil quand il nous recevait, une ambiance curieuse ; parce que trop capitonnée, trop sérieuse … Tout cela manquait de…gaieté, de vie tout simplement ; chacun le disait.

Il devait « être mal » en permanence, et ne voulait pas nous le dire … La preuve !!

Bon allez !

Je pourrai bien sûr encore en parler … En tous cas pour moi, une grande fierté le Petit Frère. Une grande tendresse, toujours, mais il m’interdisait de l’exprimer … Et aujourd’hui, reste un vide géant pour moi, en même temps qu’un grande douleur. Le sentiment qu’il a certainement manqué bien des formes de bonheur : il ne voulait surtout pas d’enfant par exemple ; et peu attiré par ceux des autres… !!!

Mais curieusement pour moi, aujourd’hui, domine encore un réel bonheur d’en parler (un besoin, sûrement).

 

Un Pied-Noir me manque…dont je reste bien fier.

par Pierre GIMENO

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